Une véritable hécatombe retour
À la fin de l'hiver, les batraciens migrent massivement et de façon tout à fait spectaculaire, de la forêt où ils s'étaient réfugiés vers la rivière où ils vont pondre. Ce sont des animaux amphibiens qui vivent dans l'eau pendant le stade larvaire (respiration par des branchies) alors que les adultes mènent une vie essentiellement terrestre. Mais ce retour au milieu aquatique nécessaire à la reproduction est extrêmement dangereux pour ces animaux, notamment du fait qu'ils courent un grand risque de se faire écraser par les voitures lorsqu'ils traversent les routes.
À titre d'exemple, du 27 février au 20 mars 2000, huit adhérents de La Sylve ont participé à des prospections nocturnes en vue de dénombrer les batraciens amenés à traverser la route des étangs de Commelles, lors de leur migration vers la rivière de la Thève : ils ont compté 1 rainette et 1 209 crapauds, dont 928 vivants et 281 écrasés
Mise en place de barrages retour
Pour éviter une pareille hécatombe, La Sylve a participé, pendant de nombreuses années, à la mise en place de barrages pour la protection des batraciens au moment de la ponte, afin de sécuriser leur traversée de la route des Étangs.
Ces barrages, tout le long de la route, consistaient à tendre un fil de fer fixé sur des piquets de bois à 50 centimètres du sol ; une bâche en plastique était tendue sur le fil de fer et maintenue au sol par un petit monticule de terre. Tous les dix mètres était creusé un trou dans lequel un seau était enfoncé jusqu'à fleur de terre. Ainsi les batraciens, qui viennent de la forêt et migrent vers les étangs, étaient stoppés dans leur progression par les bâches ; cherchant désespérément une issue, ils tombaient dans les seaux ; le lendemain matin, il ne restait plus qu'à aller vider les seaux de l'autre côté de la route !
Le barrage longeait la route des Étangs et s'étendait sur 800 mètres vers le pont Mandrou. La mise en place de ce dispositif nécessitait de la main-d'œuvre bénévole, presque exclusivement fournie par les adhérents de La Sylve ; un planning était établi pour que tous les matins, à partir de sept heures, les volontaires récupèrent les seaux, comptent le nombre de mâles et de femelles et les déversent de l'autre côté de la route, les orientant ainsi vers la Thève où se produit la ponte. Le comptage permettait au responsable du Parc naturel régional (PNR), monsieur Hercent, de prendre connaissance de l'importance du nombre d'individus écrasés.
Route interdite à la circulation nocturne retour
Aujourd'hui, la circulation automobile est interdite toute la nuit en période de migration (à la fin de l'hiver), de 19 heures à 7 heures du matin. En accord avec le PNR, c'est la gendarmerie nationale implantée à Orry-la-Ville qui effectue des rondes et surveille l'application de l'arrêté municipal. N'essayez pas d'aller vous promener en voiture à ce moment-là du côté des étangs, il pourrait vous en coûter une amende de 135 euros. La vie des batraciens est précieuse !
Les crapauds reçoivent France-Inter retour
Le mardi 12 mars 2002, l'APSOM (Association pour la Sauvegarde d'Orry la Ville et Montgrésin), la Direction des Sites et Environnement, La Sylve et France-Inter se retrouvent, à 9 heures, à la table ronde.
Nous nous rendons sur la route des étangs où se dresse le barrage (bâches en plastique) dressé par la Sylve. La journaliste, Nathalie Fontrel, espère bien voir des crapauds ; malheureusement, l'opération "ramassage" est terminée pour aujourd'hui et les 36 batraciens récupérés dans les seaux ce matin sont repartis avec notre aide vers leur lieu de ponte.
Après l'interview des responsables présents, nous nous mettons en quête de trouver au moins un crapaud et après de vaines recherches, le miracle s'accomplit. Une petite grenouille semble nous attendre. Je l'attrape et appuie doucement sur son ventre pour la faire chanter. La journaliste tend le micro. Ca y est, la star est enregistrée.
Le reportage est passé sur France-Inter, le samedi 23 mars dans l'émission "Chassez le naturel".Jean-Marie DELZENNE